Panorama des propositions soumises au budget participatif 2021
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Panorama des propositions soumises au budget participatif 2021
Au bout de vingt-cinq ans de projets de promenades et de cinq ans de budget participatif concernant la Petite Ceinture, il nous semble intéressant de dresser un panorama des propositions soumises au budget participatif 2021 afin d’identifier les principaux thèmes abordés dans ces projets.
La période de dépôts des projets s’est déroulé du 4 au 28 février 2021. Nous décomptons 32 projets déposés concernant la Petite Ceinture (consultables ici) :
- Plus de la moitié (18) de ces projets visent à améliorer les promenades déjà ouvertes ;
- À la seconde place ex-aequo apparaissent les projets concernant l’ouverture de nouveaux tronçons et l’aménagement de sites situés autour de la plate-forme de la Petite Ceinture, avec 7 projets chacun.
Voyons à présent les principales caractéristiques de ces projets.
Amélioration des promenades ouvertes
Alors qu’environ 7,2 km de promenades sont ouvertes début 2021, la majorité des projets déposés visent à améliorer ces promenades. Ils peuvent être répartis en deux catégories :
- L’installation d’équipements supplémentaires (15 projets),
- La création de nouveaux accès (3 projets).
Création de nouveaux équipements
Les projets d’installation d’équipements supplémentaires sont les plus nombreux parmi ceux proposés. Ils peuvent être regroupées dans les huit sous-catégories suivantes :
- Déplacements : amélioration de la piste de la promenade du 12e arrondissement, qui devient boueuse par temps de pluie et qui s’érode avec le temps ;
- Mobilier urbain : installation de bancs, de poubelles ou d’aires de pique-nique (idées portées par ce projet et cet autre) ;
- Signalétique : pose de panneaux d’information sur l’histoire, le patrimoine, les paysages et le tracé de la Petite Ceinture, dont un projet de création d’« un balisage unifié, clair, et visible qui suivrait le tracé de la Petite Ceinture le long de ses 32 km afin de permettre aux promeneurs de le suivre à travers la ville, y compris lorsqu’on perd les rails de vue (parce qu’il passent dans un tunnel) » ;
- Végétalisation : plantation d’arbres fruitiers et installation de bacs à compost ;
- Amélioration des conditions de travail des associations d’insertion, qui entretiennent la Petite Ceinture depuis 2006 ;
- Équipements culturels : installation de supports d’expositions photographiques et création de bibliothèques partagées ;
- Équipements sportifs : installation de machines de sport, installation de fontaines à eau et création d’un skatepark ;
- Activités ludiques pour enfants : création d’aires de jeux et animation d’une ludothèque sur rail ;
- Activités ferroviaires : exploitation d’un vélorail ;
- Solidarité : hébergement d’urgence pour des sans-abris dans des voitures ferroviaires.
Ces propositions témoignent du fait que le choix de la Mairie de Paris de réaliser des aménagements légers sur la Petite Ceinture n’est pas bien accepté. Cette légèreté est un choix délibéré de sa part. Elle évoque ainsi « un sentier ferroviaire circulant sur la plateforme ferroviaire, dans le respect des espaces préexistants et du patrimoine architectural et végétal », ce qui distingue ces promenades des parcs et jardins habituels de la Ville.
Cette légèreté offre l’avantage économique de minimiser le coût des aménagements, dans un contexte de restriction des dépenses, de prendre en compte la réversibilité des aménagements (cliquer ici pour plus de détails), ainsi que les contraintes techniques et topographiques liées à la Petite Ceinture, comme nous l’expliquons dans cet article. Le coût moyen au kilomètre a même baissé d’environ 25 % entre la promenade du 15e arrondissement, ouverte en 2013, et les promenades ouvertes entre 2014 et 2020.
Par ailleurs, les cheminements piétons des promenades existantes nécessitent un entretien régulier. Le paillage de bois et la grave installés sur les promenades ouvertes pendant la mandature 2014-2020 nécessitent d’être rafraichis, comme le montre la photographie ci-dessus. Par ailleurs, le platelage en bois installé en 2013 sur une partie de la promenade du 15e arrondissement nécessite d’être remplacé.
Enfin, parmi ces propositions, deux sont d’ores et déjà vouées à l’échec pour des raisons qui correspondent aux contexte d’ouverture au public de la Petite Ceinture :
- La proposition d’un skatepark concernant l’espace de la Petite Ceinture situé sous le pont-route des rues Manin et Jaurès, en bordure du parc des Buttes-Chaumont. Or la convention de superposition d’affectation signée par la SNCF et la Mairie de Paris en juillet 2018 indique que cet espace ne peut être ouvert au public tant que le pont-route n’est pas rénové.
- La proposition d’un vélorail a déjà été soumise au budget participatif 2019 et rejetée par la Mairie de Paris principalement parce qu’il ne lui revient pas d’exploiter une telle activité, comme elle l’explique ici. Notre article consacré à l’exploitation de trains touristiques et de vélorails fournit les informations nécessaires.
Création de nouveaux accès
Trois propositions de création de nouveaux accès concernent les promenades du 12e, du 14e et du 17e arrondissements. L’absence de ces accès aujourd’hui n’est pas le fruit du hasard, comme nous le montrons dans notre étude sur le coût d’une promenade aménagée sur la Petite Ceinture, mais a pour objectif de minimiser le coût d’aménagement. Il en est de même de l’absence d’ascenseurs, qui en plus coûtent cher en maintenance. Par conséquent, les demandes d’installation d’ascenseurs sont vouées à l’échec.
Ouverture de nouvelles promenades
Force est de constater que tous les projets soumis au budget participatif 2021 qui demandent l’ouverture de nouvelles sections au public souffrent d’un cruel manque d’informations sur les contraintes juridiques, techniques et budgétaires pesant sur ce type de projet.
Sur le plan budgétaire, les coûts sont soit non évalués soit largement sous-estimés. Un intervenant exprime d’ailleurs la difficulté à réaliser une telle évaluation.
Deux projets (ici et là) envisagent la totalité des 23 kilomètres nord, est et sud, alors qu’une telle réalisation est impossible à court terme pour la Mairie de Paris, car le nombre maximum de kilomètres de promenades ouvertes pendant une mandature municipale sur la Petite Ceinture est d’environ 4,7 km pendant la mandature 2014-2020, alors qu’il reste environ 18 km aménageables (pour plus de détails, consulter cet article).
Deux autres projets concernent des sections dont l’aménagement a été abandonné par la Mairie de Paris pendant la mandature 2014-2020, mais qui sont repris dans le budget participatif 2019 et devraient être réalisés durant la mandature 2020-2026 :
- Le premier projet évoque l’aménagement de la section de la Petite Ceinture comprise entre les deux courtes promenades ouvertes dans le 19e arrondissement en 2019, pour les piétons et les cyclistes. Mais cette section est situé en viaduc, ne possède aucun accès pré-existant et est jalonnée de 7 ponts-rails dont 6 ponts-rails métalliques, ce qui a pour effet d’augmenter le coût d’aménagement par rapport aux promenades déjà ouvertes (pour des explications détaillées, lire notre article sur le coût d’une promenade sur la Petite Ceinture) ;
- Le second projet concerne l’ouverture au public du tunnel de Vaugirard, qui nécessite pour des raisons de sécurité l’aménagement de rampes d’accès pour les véhicules de secours. À la limite, si la rampe à la sous-station électrique de la rue Jacques Baudry pouvait être utilisée et si une promenade était aménagée le long du parc Georges Brassens jusqu’à cette rampe, comme nous l’évoquons dans cet article, une telle éventualité pourrait être étudiée. Mais il reste encore du chemin à parcourir. À noter que le tunnel de Vaugirard, long de 330 m, a fait l’objet en 2017 d’un appel à projet dans le cadre du projet « Réinventer Paris - Les dessous de Paris » qui a été déclaré infructueux par la Mairie de Paris en mars 2018, preuve de la difficulté qu’il y a à ouvrir ce tunnel au public (pour plus de détails sur cet appel à projets, consulter cet article).
Un dernier projet demande la création d’une promenade au sud du 20e arrondissement, entre la rue de Bagnolet et la rue du Volga. Là-aussi, des ponts-rails métalliques sont à franchir, comme ceux des rues Vitruve, des Orteaux et d’Avron, ce qui augmente le budget nécessaire.
Par ailleurs, trois de ces projets demandent la création d’une piste cyclable, alors que la Mairie de Paris exclut un tel usage pour la Petite Ceinture pour les principales raisons suivantes [1] :
- La plate-forme de la Petite Ceinture est très encaissée ou en talus, ce qui fait que les endroits où elle se trouve au niveau de la voirie sont rares (lire à ce sujet notre article sur les obstacles topographiques à l’aménagement d’une promenade sur la Petite Ceinture) ;
- Une piste cyclable est contraire à la mixité des usages ;
- La politique de la Ville de Paris favorise le vélo dans les rues et pas simplement relégué à la Petite Ceinture.
Rénovation de sites situés le long de la Petite Ceinture
La dernière grande catégorie de projets concerne la rénovation de sites situés le long de la plate-forme de la Petite Ceinture.
Sur les sept projets soumis appartenant à cette catégorie, deux concernent des sites faisant l’objet d’un appel à projet de la part de SNCF Immobilier durant l’été 2020 :
- Le bâtiment du 105 rue Curial dans le 19e arrondissement, pour le projet « Au fil du rail »,
- Le bâtiment du 1 rue Florian dans le 20e arrondissement, pour le projet « La Maison Florian ».
Ces projets sont soumis par des collectifs pré-sélectionnés dans le cadre de l’appel à projet de SNCF Immobilier.
Le troisième projet est déposé par le collectif qui anime depuis février 2020 la Flèche d’Or, dans le 20e arrondissement. La Mairie de Paris a décidé durant l’été 2020 d’entamer des négociations avec l’actuel propriétaire de la Flèche d’Or pour le racheter.
Ces trois projets demandent l’intervention de la Mairie de Paris, au travers du budget participatif, pour financer la rénovation des bâtiments concernés afin d’accueillir du publi. Le total des montants estimés est d’environ 4,9 millions d’Euros.
Un quatrième projet concerne l’extension du jardin de la gare de Charonne sur une surlargeur de la Petite Ceinture. Ce projet est déjà sélectionné par la Mairie de Paris dans le cadre du Budget Participatif 2019.
Enfin, les trois derniers projets de cette catégorie concernent l’aménagement du dessous de ponts-rails de la Petite Ceinture et de la voirie environnante avenue de Saint-Mandé, place Balard et rue Vitruve.
Le budget participatif à l’épreuve du réel
Le nombre important (32) de projets soumis au budget participatif concernant la Petite Ceinture souligne l’intérêt porté par le grand public à ce sujet, qui accompagne l’ouverture au public d’environ 7,2 km de promenades début 2021.
Mais force est de constater que beaucoup des projets soumis qui concernent les promenades souffrent d’un manque de connaissance des contraintes juridiques, techniques et budgétaires pesant sur ce type de projet.
Malheureusement, la Mairie de Paris n’aide pas le public sur ce point. Sur son site Internet, elle présente ces promenades et leur principe d’aménagement, mais ne communique pas sur ces contraintes, alors qu’elle dispose d’un retour d’expérience depuis la fin de la mandature 2014-2020. Comme le montre l’exemple que nous citons des pistes cyclables, les représentants de la Mairie peuvent fournir des explications pendant des réunions publiques, mais malheureusement elles sont rarement reprises dans la communication officielle (communiqués et dossiers de presse) publiés par la Mairie et sur laquelle se basent les grands médias pour évoquer le sujet, comme dans cet article du Parisien.
À quoi bon dès lors demander à la population de soumettre des projets si leurs critères de faisabilité ne sont pas rappelés lors de ces consultations ? D’autant plus que cela risque de rendre opaque la sélection des projets réalisée par la suite.
Le fait que plusieurs projets reviennent depuis plusieurs années souligne que le rythme de réalisation imposé par les contraintes juridiques, techniques et budgétaires (sans compter les aspects politiques) est bien plus lent que le rythme souhaité par le public, ce qui dans certains cas génère de l’impatience voire de la frustration.
Enfin, la Mairie de Paris doit faire face en 2021 à des marges de manœuvre réduites dans un contexte de la récession économique, touchant le tourisme par exemple, et en l’absence de ressources complémentaires envisageables, suite à l’échec du projet visant à lui permettre de toucher des redevances de la part d’opérateurs privés. Dans ce contexte défavorable, quelle issue la Mairie donnera-t’elle aux projets soumis en 2021, alors qu’il reste à réaliser des projets votés lors des budgets participatifs 2018 et 2019 ?
[1] Réponse donnée lors de la réunion publique organisée le 16 septembre 2016 à la Mairie du 20e arrondissement afin de présenter l’aménagement de promenade de la rue de la Mare.
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